Le moratoire sur les cabinets médicaux est levé sans renforcer le contrôle de la formation des médecins étrangers
Un communiqué de presse de l’AMG
Mise en œuvre par le Conseil fédéral dès juillet 2002, la clause du besoin, qui limite le nombre de nouveaux médecins installés, a été entièrement levée le 1er janvier sans convaincre qu’elle avait atteint son but. Il s’agissait en effet de faire face à un hypothétique afflux massif de médecins européens en raison des Accords bilatéraux et, en conséquence, à une forte augmentation de la consommation médicale.
Cette mesure introduite dans la loi sur l’assurance-maladie était initialement limitée à trois ans et devait laisser le temps de trouver une solution à la hausse des dépenses de santé. Elle a finalement été reconduite plusieurs fois jusqu’à la fin de 2009 pour les médecins généralistes et pédiatres, et de 2011 pour les spécialistes. Dans un premier temps, son annonce avait été suivie de l’installation en hâte de nombreux médecins en fin de formation, puis d’un afflux de jeunes médecins étrangers nécessaires pour les remplacer dans les hôpitaux. Une liste d’attente de plusieurs années s’est ensuite constituée, forçant nombre de médecins formés à s’engager comme employés de centres médicaux, cliniques ou services d’urgence, ceux-ci n’étant jusqu’en 2009 pas soumis à la même limitation que les cabinets indépendants.
Ces mesures n’ont pas diminué les besoins médicaux ni mis fin à l’arrivée de médecins étrangers sans lesquels les hôpitaux ne pourraient assumer leur fonction, la relève locale étant insuffisante en raison de la capacité des facultés de médecine. En fait, ces listes d’attente ont surtout pénalisé les médecins arrivant au terme de leur formation en Suisse, tandis que les médecins étrangers, pratiquant déjà dans leur pays, ont pu s’en accommoder plus facilement. Si la clause du besoin a été appliquée de manière rigoureuse dans le canton de Genève, elle n’a pas eu l’impact attendu sur les dépenses de santé dont l’augmentation résulte d’un besoin accru de consultations et d’interventions, car les tarifs médicaux n’ont été ni indexés ni relevés depuis une trentaine d’années. L’introduction de TARMED en 2004 a même aggravé l’érosion du revenu des cabinets au point de menacer leur survie dans plusieurs spécialités.
Les médecins genevois regrettent en particulier que la levée du moratoire sur les cabinets médicaux n’ait pas été accompagnée d’un examen plus approfondi de la formation obligatoire après le diplôme professionnel. Les médecins européens obtiennent aujourd’hui une validation automatique de leurs diplômes sans que la formation accomplie soit vérifiée. Or celle-ci est souvent différente des exigences suisses. Les conditions de travail s’améliorant, notamment en Allemagne, la pratique dans notre pays devient moins attrayante et il faut craindre qu’elle attire d’abord les médecins les moins bien insérés dans leur système de santé national. S’il est facile de donner l’illusion de pratiquer une médecine peu coûteuse, les soins ne sont efficaces et économiques que s’ils sont prodigués par des médecins parfaitement préparés. La préoccupation des coûts ne doit donc jamais faire oublier la qualité des soins. Les expériences ne manquent pas pour se convaincre qu’une telle politique mène à une impasse.